Critique de Drive


Résumé : Un cascadeur tranquille et anonyme se métamorphose dès que la nuit tombe : il devient pilote de voitures pour le compte de la mafia.

Ma note : 10/10






Dans Drive, il y a tout ce que j’aime dans le cinéma. Avant d’expliquer pourquoi, je vous déconseille de lire ma critique si vous n’avez pas vu le film, pour ne pas vous gâcher un des plus beaux moments cinématographiques potentiel de votre vie. Je recommande fortement Drive à tout public. Ce n’est pas un film d’action ou de voiture, et il ne faut pas nécessairement être ultra-cinéphile pour l’apprécier, même si ça aide !

Du grand cinéma

Drive, c'est d'abord un film cinématographiquement incroyable. On a l’impression d’assister à chaque plan à un travail de chirurgien. Quand ils sont trois dans la voiture par exemple, on voit Ryan Gosling, Carey Mulligan, et la tête de son fils dans le rétroviseur. Tout est comme ça; millimétré. La photographie, les décors, la ville la nuit, tout est superbe. En plus, on sent que le réalisateur rend hommage aux cinémas qu’il aime. Même sans être connaisseur du cinéma coréen, la scène du marteau fait tilt tout de suite. Le cassage de crane, lui, rappelle « Irréversible », ce qui est logique puisque le réalisateur dit lui-même avoir demandé conseil à Gaspard Noé.

Drive est aussi pour moi un film novateur. La première scène est une course poursuite de voitures sans vitesse, et le résultat est génial. On se fait 5 minutes dans la voiture avec eux, aucun plan n’étant extérieur à la voiture, avec une bonne tension et une musique pulsative qui fonctionne parfaitement. Le choix de la musique en général est pour beaucoup dans la réussite du film, avec un décalage original entre le son 80’s et la ville actuelle. L’écriture rose bonbon donne aussi du charme dès le générique. 

NicolasWinding Refn (NWR) réussit à rendre contemplatif un film d’action. Drive n’est pas une idée sortie de la tête du réalisateur, mais un film de commande, donc voulu par un producteur. En plus c’est une adaptation de livre. Le géni de NWR a donc été selon moi de mélanger un côté "film d’auteur" à une œuvre très hollywoodienne. Tout cela donne un film unique, captivant, depuis le tout début jusqu’à la fin. Certains passages sont purement contemplatifs, montrant même des scènes cucul la praline au ralentit, proche d’un roman photo de "Jeune & jolie", mais ça passe. Il y a une sorte de magie grâce à la musique et parce qu’elles sont comprises dans un film avec des poursuites et des gangsters. A l’opposé, le film captive aussi grâce à des scènes sans musique, où seules la tension et l’attente tiennent en haleine : quand il rencontre le mari dans le couloir par exemple, on se demande s’ils vont se battre, ou encore lors de la scène du marteau, on s’attend au pire, etc.… Ce suspens fonctionne aussi grâce à de nombreuses fausses pistes dans le scénario : on croit notamment un moment qu’il va faire des courses de voiture. 

A real Hero ?


Contrairement à ce qu'on peut lire sur ce film, le thème abordé par le film n'est pas du tout anecdotique. En apparence, oui, le scénario est très basique, facile à comprendre, sans twist, du déjà vu… Pourtant, le film propose une réflexion sur ce qu’est un héros. A la fin, on se demande si le personnage de Ryan Gosling est un héros ou non, parce que la question nous est finement posée dans le film. C’est fin car ce n’est jamais ouvertement débattu, et pourtant cela reste évident. Dès le début, la chanson « A Real Hero » nous conditionne : « human being, and a real hero ». Tout au long du film, on retrouve ce thème, notamment par la mise en scène. 
Au début, Ryan, qui travaille comme cascadeur pour un film, se prépare devant la glace. A ce moment, le traveling montre d’abord le reflet du héros du film qu'il va doubler, et continue en avançant pour que ce reflet devienne réalité au même endroit, juste derrière, en montrant Ryan. Le héros est donc présenté comme le reflet du héros, et non un héros à part entière. 
Plus évident, dans le canapé devant la télé, Ryan et le petit discutent d’un personnage de dessin animé et se demandent si ce requin est méchant ou non : « How do you know he’s a bad guy ? Because he’s a shark ! ». C'est en fait une mise en abîme de la réflexion que le spectateur peut se poser : le requin que va devenir Ryan peut-il être un héros ? 
Le jeu des mirroirs et le masque vont dans ce même sens, pour accentuer l’ambiguïté de la question du héros. Cela montre bien qu’au cinéma , même aujourd’hui, on n’a pas besoin de beaucoup de dialogues pour faire passer un message… De temps en temps, ça fait du bien ! 

Alors est-ce un héros ce conducteur ? Le film donne-t-il une réponse ? Même si la question reste ouverte, il est évident que le "Driver" est montré pendant la première moitié du film comme le Prince Charmant. Comme lui, il n’a pas de nom, pas de passé, il est beau, habillé en blanc, sa voiture peut représenter sa monture moderne… Il est 100% irréprochable, avec elle, avec son fils, et même avec son mari. Le Prince Charmant protecteur venu pour la sauver. C’est ainsi qu’elle le voit en tout cas. Mais forcément, tout Prince Charmant doit savoir se battre et faire des choses peu reluisantes pour retrouver la princesse...
La première fois où l’on voit son « côté sombre », c’est quand il parle violemment à un homme dans un bar, le menaçant de lui exploser les dents. Puis petit à petit, son côté psychopathe se dévoile jusqu’à la scène de l’ascenseur. La scène qui change tout, le tournant. Avant il est Prince Charmant, il l’embrasse, puis il devient monstre.
Il explose la tête du mec, sans trop de difficultés, et donne un nombre de coups vraiment impressionnant. Et voilà que la princesse ne peut plus faire semblant, elle a vu le coté noir du Prince Charmant. Son manteau blanc restera sale et taché de sang jusqu’à la fin du film, et la porte de l’ascenseur se referme. On comprend qu’il l’a perdue. Pourtant, il n’a voulu que la protéger. Tout le film est construit autour de cette scène centrale, cristallisant à la fois sa monstruosité maximale et l’acmé de sa "princecharmansité". Certains trouvent que le film bascule dans le gore et la violence gratuite. Au contraire, c’est loin d’être gratuit à mon avis, puisque cela permet de se mettre à la place de la princesse, étonnée et choquée… 
Tout ça m’a personnellement fait réfléchir, ce n’est donc pas seulement un film visuel !

Un film à voir et à revoir


J’ai aimé Drive pour toutes ces raisons longuement développées, mais une seule suffit : c’est une claque visuelle et auditive exceptionnelle !



Recommandation : 10/10

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire